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Julien Gracq, de son vrai nom Louis Poirier, né le à Saint-Florent-le-Vieil (Maine-et-Loire) et mort le à Angers, est un écrivain français.
Si Au château d'Argol, son premier roman, fortement influencé par le romantisme noir et par le surréalisme, avait attiré l'attention d'André Breton, c'est avec Le Rivage des Syrtes, et surtout le spectaculaire refus de son auteur de recevoir le prix Goncourt en 1951, que Julien Gracq s'est fait connaître du public. Reconnaissance paradoxale pour cet écrivain discret qui s'est effacé derrière une œuvre protéiforme et originale, en marge des courants dominants de la littérature de son époque (voire en opposition), qu'il s'agisse de l'existentialisme ou du nouveau roman. Après avoir abandonné l'écriture de fiction, Julien Gracq publie à partir de 1970 des livres qui mélangent bribes d'autobiographie, réflexions sur la littérature et méditations géographiques.
Traduites dans vingt-six langues, étudiées dans des thèses et des colloques, proposées aux concours de l'agrégation, publiées de son vivant dans la bibliothèque de la Pléiade, les œuvres de Julien Gracq ont valu à leur auteur une consécration critique presque sans équivalent à son époque.
Second enfant d'un couple de commerçants aisés (qui ont eu une fille, Suzanne, née neuf ans plus tôt, et à laquelle il restera très attaché), Louis Poirier est né le 27 juillet 1910 à Saint-Florent-le-Vieil, petite ville des bords de Loire, entre Angers et Nantes, où ses ancêtres paternels sont installés depuis plusieurs siècles[1]. Il y passe une enfance heureuse et campagnarde, expliquera-t-il plus tard, dont les premiers souvenirs sont associés à la lecture (il découvre très jeune les œuvres de Fenimore Cooper, d'Erckmann-Chatrian, d'Hector Malot, et surtout de Jules Verne, qui « a été la passion de lecture de toute [s]on enfance ») et à la présence, en arrière-plan, de la guerre, qui ne le touche pas directement, personne dans sa famille n'étant mobilisé[2].
En 1921, à l'issue de ses études primaires, il est envoyé à Nantes, où il devient interne au Lycée Georges-Clemenceau. Immédiatement, il se prend à détester la vie d'internat, qui lui apparaît comme pesante et odieuse[3]. La découverte du Rouge et le Noir de Stendhal, dont la lecture le bouleverse, lui donne le modèle et le mode d'emploi de la révolte qui restera la sienne tout au long de son existence : une fin de non-recevoir, froide et délibérée, mais purement intérieure, assénée à l'ordre du monde social[4]. Louis Poirier est toutefois un élève brillant, le plus remarquable de toute l'histoire du lycée de Nantes : il obtient sept fois le prix d'excellence (avec 6 à 11 prix chaque année), trois prix et deux accessits au concours général lors des sessions 1927 et 1928[5].
En 1928, reçu au baccalauréat avec mention Très bien, il est admis en classe préparatoire au Lycée Henri-IV à Paris, où il suit les cours de philosophie d'Alain. Il découvre à cette époque l'art moderne, le cinéma, et la littérature contemporaine (Paul Valéry, Paul Claudel[6]...). Enfin, en 1929, il a la révélation de l'opéra wagnérien, découvert lors d'une représentation de Parsifal[7]. En 1930, Louis Poirier est admis à l'École normale supérieure. C'est à cette époque qu'il découvre le surréalisme, à travers quelques ouvrages d'André Breton : Nadja, le Manifeste du surréalisme, peut-être aussi Les Pas perdus[8]. Autre découverte, elle aussi marquante à sa façon : celle de l'idéologie nazie, par l'intermédiaire d'un groupe d'étudiants allemands à l'occasion d'un voyage scolaire à Budapest en 1931[9].
Louis Poirier suit en parallèle des cours à l'École libre des sciences politiques (il en sera diplômé en 1933). Choisissant d'étudier la géographie, en hommage à Jules Verne, dira-t-il par la suite[10], il est élève d'Emmanuel de Martonne et d'Albert Demangeon[11]. En 1934, Louis Poirier publie son premier texte, un article en partie issu d'un mémoire universitaire : « Bocage et plaine dans le sud de l'Anjou », qui parait dans les Annales de géographie[12]. La même année, il est reçu à l'agrégation d'histoire et géographie, et est affecté, d'abord à Nantes, au lycée Clemenceau où il avait été élève, puis à Quimper.
À Quimper, Louis Poirier anime le cercle d'échecs[13], ainsi qu'une section syndicale de la CGT[14]. Il est également, à partir de 1936, adhérent au Parti communiste français. Son engagement politique le pousse à prendre part à la grève – illégale – de septembre 1938, ce qui lui vaut une suspension temporaire de traitement[15]. Mais il a des difficultés à concilier cet engagement politique avec sa pratique de l'écriture, dont l'esthétique est très éloignée du réalisme socialiste.
En effet, en 1937, après avoir obtenu un congé sans solde d'une année pour se rendre en URSS afin d'y préparer une thèse de géographie (projet avorté pour cause de non-réception du visa d'entrée dans ce pays[16]), Louis Poirier s'est lancé dans l'écriture d'un roman : il s'agissait là, expliquera-t-il plus tard, de son premier acte d'écriture. Il n'y a pas eu chez lui de « tentatives précoces », d'ébauches avortées rédigées au sortir de l'adolescence[17]. Ce qui le conduira à expliquer qu'il se considère comme un « écrivain tardif » : « mon premier livre a été Au château d'Argol ; une heure avant de le commencer, je n'y songeais pas[18]. » Ce premier roman, « plus abstrait, plus violent et plus révélateur[19] » que ceux qui le suivront, met en scène les relations ambiguës, fortement teintées d'érotisme et de violence, entre trois jeunes gens (deux hommes et une femme), dans un style inspiré d'Edgar Allan Poe et de Lautréamont[19]. Une fois l'écriture d'Au Château d'Argol achevée, Louis Poirier le fait parvenir aux éditions de la NRF, qui refusent le manuscrit. Il le laisse alors dans un tiroir, jusqu'à ce qu'il rencontre José Corti, l'éditeur des surréalistes, qui apprécie l'ouvrage et accepte de le publier à condition que son auteur participe aux frais d'édition. Le texte paraît, augmenté d'un « Avis au lecteur » rédigé après-coup, dans lequel l'auteur revendique les influences de Wagner et du surréalisme, et récuse par avance toute interprétation symbolique du roman[19]. Plus tard, Gracq expliquera que cet « Avis » avait pour fonction première de brouiller les pistes[20].
C'est à cette époque que Louis Poirier décide de prendre un pseudonyme littéraire, afin de « séparer nettement [s]on activité de professeur de [s]on activité d'écrivain ». Voulant que l'ensemble du nom et du prénom forme trois syllabes et contienne des sonorités qui lui plaisent[21], il se décide pour Julien Gracq. Le prénom est sans doute un hommage à Julien Sorel, le héros du Rouge et le Noir, tandis que le nom peut faire référence aux Gracques de l'histoire romaine, même s'il a peut-être surtout été choisi pour sa brièveté, sa voyelle grave et sa finale explosive[21].
La diffusion du Château d'Argol est confidentielle (130 exemplaires vendus en un an, sur un tirage de 1 200[22]), mais celui-ci est remarqué par Edmond Jaloux, Thierry Maulnier, et surtout André Breton, qu'il connaissait déjà[23] et à qui Gracq avait envoyé un exemplaire du roman. Le « pape du surréalisme » lui adresse en réponse une lettre enthousiaste[24] et lors d'une conférence prononcée à Yale en octobre 1942, Breton précisera l'importance qu'il accorde à ce roman « où, sans doute pour la première fois, le surréalisme se retourne librement sur lui-même pour se confronter avec les grandes expériences sensibles du passé et évaluer, tant sous l'angle de l'émotion que sous celui de la clairvoyance, ce qu'a été l'étendue de sa conquête[25]. »
Les deux hommes se rencontrent à Nantes en août 1939, et immédiatement est réglée la question de la non-appartenance de Gracq au groupe surréaliste, auquel il ne souhaite pas se joindre[26].
Il rompt la même année avec le Parti communiste, à la suite de l'annonce du pacte germano-soviétique. « Depuis, je n'ai jamais pu ni mêler quelque croyance que ce soit à la politique, ni même la considérer comme un exercice sérieux pour l'esprit », avouera-t-il plus tard, tout en précisant qu'il « li[t] les journaux » et « vote régulièrement[27] ».
On a souvent dit que les fictions de Julien Gracq se caractérisent par l'attente d'un événement, dont la nature est généralement catastrophique et à l'orée duquel se concluent ses récits[28]. À la fin de l'année 1939, cette situation dans laquelle il se plaît à se trouver en imagination rejoint l'atmosphère générale dans laquelle baigne la France de la « drôle de guerre », cette époque « très étrange » où « tout était en suspens ». « La débâcle était dans l'air, expliquera-t-il plus tard, mais il était absolument impossible de prévoir sur quoi allait déboucher cette attente très anxieuse[29]. » Cette période très particulière d'une guerre déjà déclarée mais pas encore commencée lui fournira la matière du Rivage des Syrtes (1951) et du Balcon en forêt (1958)[30]. Louis Poirier est mobilisé à la fin du mois d'août 1939 dans l'infanterie, avec le grade de lieutenant au 137e RI.
Le régiment, d'abord cantonné à Quimper, est envoyé à Dunkerque, puis en Flandres, avant de revenir à Dunkerque, où, au mois de mai 1940, il affronte l'armée allemande durant huit jours, autour de la tête de pont de Dunkerque[31]. Gracq est fait prisonnier et envoyé dans un oflag en Silésie, où sont également internés Patrice de La Tour du Pin, Raymond Abellio, ou encore Armand Hoog, qui devait plus tard décrire l'attitude du prisonnier Gracq en ces termes : « [il était] le plus individualiste, le plus anticommunautaire de tous, le plus férocement antivichyssois, il passait là-dedans comme soutenu par son mépris, sans se laisser atteindre[32] ». Ayant contracté une infection pulmonaire, Julien Gracq est libéré en février 1941. Il retourne alors à Saint-Florent-Le-Vieil, juste à temps pour revoir son père, gravement malade, avant que celui-ci, peu après, ne décède[33].
Julien Gracq reprend alors ses activités d'enseignement, au lycée d'Angers d'abord, puis, à partir de 1942, à l'université de Caen en qualité d'assistant de géographie, où il entame une thèse sur la « morphologie de la Basse-Bretagne », qu'il n'achèvera pas[34].
En décembre 1943, Gracq achète à la gare d'Angers un exemplaire de Sur les falaises de marbre d'Ernst Jünger, qu'il lit d'une traite, sur un banc, dans la rue[35]. Il racontera dans Préférences (« Symbolique d'Ernst Jünger », 1959) quel bouleversement a été pour lui la découverte de ce « livre emblématique ». Les deux hommes se rencontreront à Paris en 1952, et deviendront amis. Jünger écrira dans son journal qu'il considère Gracq comme étant celui qui, « après la mort de [s]on cher Marcel Jouhandeau, écrit la meilleure prose française[36] ». La critique universitaire a par ailleurs relevé, entre les œuvres du Français et celles de l'Allemand, des similitudes stylistiques et thématiques[37] et pour Michel Murat « l'ombre des Falaises s'étend au cœur de la fiction gracquienne, du Rivage des Syrtes au Balcon en forêt, en passant par le roman inachevé dont La Route constitue le vestige[38] ».
En 1945 paraît le deuxième roman de Julien Gracq : Un beau ténébreux, publié lui aussi aux éditions José Corti, auxquelles Gracq restera fidèle tout au long de sa carrière littéraire. Écrit en deux temps (une première partie a été rédigée en Silésie, durant la captivité de Gracq, tandis que la seconde a été écrite en même temps que les poèmes de Liberté grande en 1942[40]), le roman raconte la rencontre entre un groupe de personnages à « l’Hôtel des Vagues », sur la côte bretonne, et un mystérieux jeune homme, Allan. L'œuvre développe, sous la forme de longs dialogues, une réflexion sur la littérature qui sera poursuivie dans les grands textes théoriques ultérieurs[40]. Proposé pour le Prix Renaudot, Un Beau ténébreux obtient trois voix, ce qui attire l'attention sur Le château d'Argol[41], réédité la même année. Tous les comptes rendus ne sont d'ailleurs pas élogieux : Étiemble notamment exécute dans Les Temps modernes la première œuvre de l'écrivain, en laquelle il dénonce un exercice de style artificiel et prétentieux[42]. À l'inverse, Maurice Blanchot, qui avait apprécié Argol, est déçu par le deuxième roman[43].
L'année suivante paraît un recueil de poèmes en prose, Liberté grande, d'inspiration surréaliste et rimbaldienne, écrits entre 1941 et 1943, qui pour certains ont déjà été publiés dans des revues proches de la mouvance surréaliste. L'ouvrage sera augmenté de plusieurs textes lors de rééditions ultérieures, et notamment de « La sieste en Flandre hollandaise », un des chefs-d'œuvre de la prose gracquienne[44].
En 1946, Julien Gracq quitte l'université de Caen. Il est nommé l'année suivante au lycée Claude-Bernard de Paris, où il enseigne l'histoire-géographie jusqu'à sa retraite en 1970, se montrant un enseignant d'une pointilleuse exactitude, qui « s'arrangeait pour que son discours s'achève à la seconde même où se déclenchaient les sonneries[45] ». Il habite rue de Grenelle à côté de la fontaine des Quatre-Saisons.
C'est en 1948 qu'est publié le premier grand ouvrage critique de Julien Gracq : il est consacré à André Breton, envisagé non pas en tant que chef de file du mouvement surréaliste, mais bien en tant qu'écrivain, ainsi que l'indique son sous-titre : Quelques aspects de l'écrivain. Pour autant, le choix de ce sujet d'étude, outre qu'il correspond à un désir ancien d'écrire sur l'auteur de Nadja, s'inscrit dans le contexte d'une polémique autour de la nature et de l'actualité du surréalisme en regard des orientations nouvelles de la littérature « engagée » : en 1945, Benjamin Péret a écrit Le Déshonneur des poètes, qui dénonçait la notion de poésie engagée. En 1947, lui répondent Roger Vailland, dans un pamphlet intitulé Le Surréalisme contre la révolution et Tristan Tzara dans une conférence sur Le surréalisme et l'après-guerre, tandis que Jean-Paul Sartre explique au même moment que « le surréalisme n'a plus rien à nous dire[46] ». En s'intéressant à la figure de Breton, Julien Gracq prend le parti de Breton et de Péret, aux côtés de Maurice Blanchot, de Jules Monnerot et de Georges Bataille, contre les « compagnons de route » du Parti communiste, Sartre en tête, envers qui il manifestera une hostilité constante[47].
Titre: AU CHATEAU D'ARGOL Auteur(s): J GRACQ Editeur: Librairie Jose Corti Année d'édition: 1989 Etat: Occasion - Bon ISBN : 9782714302977 Commentaire: Ancien livre de bibliothèque. Petite(s) trace(s) de pliure sur la couverture. Ammareal reverse jusqu'à 15% du prix net de ce livre à des organisations caritatives. Chez Ammareal nous vendons des livres d'occasion en ligne fournis par nos partenaires bibliothèques et associations.Nous reversons une part du prix de chaque livre à nos partenaires et à des organisations caritatives.Ce que [...] nous ne vendons pas nous le donnons, ce que nous ne donnons pas nous le recyclons.